Sarah, Susanne et l'écrivain : roman 

Finaliste du Goncourt 2023, ce roman de Philippe Reinhardt n’est pas d’une approche facile et s’adresse à un public déjà bien à l’aise avec la lecture. On y suit, l’histoire de Suzanne, personnage fictif et celle de Sarah, dont l’histoire de Suzanne est inspirée.

Faisant le lien entre l’une et l’autre de ces vies, on trouve bien entendu le personnage de l’écrivain, mandaté par Sarah afin qu’il transcrive sa vie. De lui, on sait peu de chose, si ce n’est qu’il écrit. Il n’est jamais nommé. En revanche, il est celui qui fait passer le récit d’un plan à un autre, changeant de plus en plus régulièrement le niveau où se passe l’action, mêlant la « réalité » à la « fiction » dans une mise en abîme savamment orchestrée et devenant parfois déroutante.

Ce travail d’écriture et de transposition de l’ « histoire dans l’histoire », principe de la mise en abîme, n’est pas simple à suivre pour les lecteurs et lectrices. Sarah, Suzanne et l’écrivain est un roman exigeant qui demande une bonne dose de concentration. Plus le récit avance et plus les points de vue de la Suzanne fictive et de la Sarah « réelle » s’entre-mêlent, parfois au cours d’une même phrase, ce qui, si on ne fait pas preuve d’une lecture attentive (ou d’une écoute active si on lit en audio) peut vite amener à perdre le fil.

Par ce procédé, Éric Reinhardt rend un remarquable hommage au travail de l’écrivain et au métier d’écrire et questionne les liens entre la réalité et la fiction.

Sous la plume de l’author_name et celle de l’écrivain du roman, on suit la vie de ces deux femmes sans savoir vraiment où se trouve la réalité des faits et ce qu’à réellement vécu Sarah.

Ce que l’on sait avec certitude, c’est que voulant créer un électro-choc chez son mari de plus en plus distant avec elle en lui annonçant quitter la maison pendant 3 mois, elle va déclencher un véritable cataclysme familial, de manière très inattendue et une abominable descente aux enfers pour elle. Une descente aux enfers qui mènera Suzanne – et Sarah peut-être – aux portes de la folie, notamment à travers la fascination qu’elle porte à un tableau religieux. Une œuvre légèrement abîmée dans un coin et porteuse de mystère.

Vous l’aurez compris, Sarah, Suzanne et l’écrivain est un roman vertigineux. Une expérience de lecture peu commune qu’on vous invite à tenter… à tête reposée !