L'amour du monde Charles-Ferdinand Ramuz

Coup de cœur

Charles-Ferdinand Ramuz est un auteur helvétique particulièrement prolifique, du début du 20^e siècle. Son roman L’amour du monde est pourtant d’une incroyable modernité et non départi d’un humour qui fait toujours mouche aujourd’hui. Et si l’arrivée du cinéma venait révolutionner la vie d’un village ?

Dans une bourgade de moins de 5’000 habitants, au bord du lac Léman, on acte politiquement (et plutôt prudemment), l’installation d’un dispositif de projection cinéma dans une des salles de la commune. Cette décision coïncide avec le retour au village du fils Joël, Louis de son prénom, revenu de pérégrinations lointaines.

Le bourg et sa population vit alors une véritable révolution liée à l’ouverture sur l’Ailleurs et le Monde. Les habitants et habitantes qui ne vivaient guère que refermés sur eux-mêmes et leur petit bout de lac avec vue sur les montagnes voisines et les vignes environnantes, découvrent émerveillés et stupéfaits des vues d’avion et des paysages inconnus, des histoires romanesques, des modes d’ailleurs ou encore des reconstitutions de scènes bibliques.

Ces scènes imagées vont infuser dans l’esprit de ces braves citoyens et citoyennes, les faire parler tard et longtemps après les avoir vues, de ces merveilles inconnues, attablés au café du coin. On s’esclaffe, on imite, on essaie de comprendre comment telle ou telle prise de vue a pu être réalisée… On se découvre l’âme rebelle ou poétique, on croit reconnaître Jésus sous les traits de l’illuminé du coin.

En marge de ces films qui donnent à voir l’altérité, on retrouve Louis Joël dans le même café qui, lui, parle « vrai » et raconte des ailleurs dont il a connu les parfums, foulé le sol, sous le regard captivé des enfants du voisinage.

On voit alors une bande de petits Indiens semer le désordre dans les rues, deux jeunes garçons prendre le large en quête d’aventure et des couples amoureux préparer une fuite romanesque, alors que les femmes des notables se mettent à porter des tenues jamais envisagées auparavant. L’amour du monde extérieur sera-t-il assez fort pour supporter le désordre public engendré ? Lisez et vous le saurez !